Depuis quelques années, ils envahissent les rayons de nos supermarchés et connaissent un succès fulgurant : les produits biologiques. Un marché français colossal de plus de 9,7 milliards d’euros qui ne cesse de croître d’années en années. Accompagnant cette croissance, un argument de choc : les produits biologiques sont meilleurs pour notre santé et pour notre planète.

Depuis quelques années, ils envahissent les rayons de nos supermarchés et connaissent un succès fulgurant : les produits biologiques. Un marché français colossal de plus de 9,7 milliards d’euros qui ne cesse de croître d’années en années. Accompagnant cette croissance, un argument de choc : les produits biologiques sont meilleurs pour notre santé et pour notre planète.

Aujourd’hui l’engouement des consommateurs pour le bio est indéniable. La France est le deuxième pays européen le plus gros consommateur de produits biologiques, derrière l’Allemagne. A elle seule, la France représente 10% du marché mondial.

Cette tendance va croissant. C’est une satisfaction pour tous quand on sait qu’il y a à peine 20 ans, l’agriculture chimique était encore à son apogée… C’est aussi une bonne nouvelle pour la santé des consommateurs, l’environnement et les agriculteurs : aujourd’hui, près des trois quarts des Français mangent bio régulièrement et ce mode d’agriculture occupe 7,5 % de la surface agricole en France, selon le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation.

En France, même si les labels publics et privés permettent de distinguer les produits biologiques, ce sont les logos européens (l’eurofeuille) et le logo AB (propriété du Ministère de l’agriculture française) qui certifient qu’un produit est issu de l’agriculture biologique. Ces derniers garantissent et renvoient tous les deux à un seul et même cahier des charges communautaire.

Ce cahier des charges est défini par des règlements adoptés par les Etats membres et le Parlement européen qui fait l’objet d’actualisations régulières. Il définit des règles de production exigeantes qui reposent sur le respect des écosystèmes et des cycles naturels. Globalement, il interdit non seulement les pesticides, mais aussi les engrais chimiques de synthèse. En revanche, il accepte la mixité des productions bio et non bio sous certaines conditions. Enfin, les produits transformés contiennent au moins 95 % d’ingrédients bio et les labels tolèrent une contamination par les OGM à hauteur de 0,9 % des produits transformés.

Hélas comme tout marché en expansion, cette évolution a suscité l’intérêt d’autres acteurs : alors que le secteur bio a longtemps vu prédominer de petits acteurs indépendants, il attire désormais de nouveaux entrants, comme les coopératives et multinationales de l’agroalimentaire conventionnel ainsi que la grande distribution et son cortège de « marques distributeurs ». Cet engouement concurrence et met à mal la crédibilité du bio. Trop de bio tue le bio ?

Forts de ce constat et face à la crise de confiance des consommateurs, nombreux sont les acteurs qui les remettent en question en créant des labels socialement et environnementalement plus stricts.

Dans ce combat, les consommateurs ont un rôle clé à jouer. Comprendre et décrypter les labels c’est privilégier les produits et les circuits de distribution qui correspondent aux valeurs que nous souhaitons promouvoir.

Comprendre les labels bio pour assurer une alimentation de qualité

Pour être commercialisés comme issus de l’agriculture biologique, les produits alimentaires sont obligatoirement contrôlés et certifiés par un organisme agréé et accrédité par les pouvoirs publics. La mission de ces certificateurs est d’assurer que le règlement européen du mode de production biologique est strictement respecté.

En France, six organismes certificateurs sont agréés par l’Institut National de l’Origine et de la qualité (INAO) et accrédités par le Comité Français d’Accréditation (COFRAC).

Un produit est labellisé bio si et seulement si les organismes garantissent la qualité et la traçabilité d’un produit destiné à la vente, l’absence totale de pesticides ainsi que la présence quasi-inexistante d’OGM.

En France, parmi les labels biologiques, seul le label AB est officiel. Néanmoins, ce cahier des charges est loin d’être complet puisqu’il omet toute une partie des sujets qui garantissent une agriculture et une alimentation plus durables. D’autres questions sont essentielles à prendre en compte : la rémunération des agriculteurs, l’impact social, la réduction des emballages, l’empreinte carbone des produits, la saisonnalité, la localité. En réponse au label officiel jugé trop permissif, de nombreux labels privés voient le jour chaque année pour influencer l’inscription de ces nouvelles pratiques dans les exigences du règlement européen.


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Pour se retrouver dans cette jungle des labels bio, voici une vue d’ensemble des labels et de leurs engagements respectifs, créée par l’ALEC (Agence Locale de l’Energie et du Climat de la métropole de Lyon).

liste des labels de qualite alimentaire bio label rouge peche durable max haavelar carre

Mais à trop vouloir multiplier les labels, n’est-ce pas un moyen pour les industriels de l’agroalimentaire de s’approprier le bio ?

La raréfaction des labels n’est-elle pas gage de qualité et de crédibilité ?

Les labels bio entre éthique et agrobusiness

Chaque année, le marché du bio connait une croissance d’environ 30%. De quoi attirer les plus grands financiers ! Et pour cause, cette manne n’a pas laissé indifférents les géants de la distribution, qui se sont lancés sur ce créneau en créant des enseignes spécialisées, Naturalia par exemple. Au nom de la « démocratisation » du bio, ils ont ainsi développé leurs propres produits, moins chers, en respectant le cahier des charges européen mais selon une logique industrielle, bien loin de la philosophie d’origine de l’agriculture biologique, qui prône un mode de production raisonnable et éthique.

Aujourd’hui les petits paysans cèdent peu à peu la place aux fermes gigantesques et aux multinationales de l’agroalimentaire. Aujourd’hui 45% du bio est détenu par la grande distribution, 37% par des filières spécialisées dont certaines sont elles-mêmes détenues par les multinationales de l’agroalimentaire et seulement 18% par les circuits courts (AMAP et vente directe). Dans ce contexte dominé par les plus grands, de plus en plus de voix s’élèvent chez les petits producteurs, militants et consommateurs pour dénoncer l’industrialisation des produits biologiques, au détriment des valeurs paysannes (respect de la nature, solidarité entre producteurs, autonomie alimentaire, diversité des cultures et des élevages, etc.).

Même si certaines enseignes prônent des slogans tels que « Le Bio… pour tous ! » ou « rendre le bio accessible à tout un chacun », nombreux sont les acteurs engagés qui critiquent le manque de cohérence entre le bio industriel et ses critères sociaux et environnementaux. En proposant par exemple des tomates et des fraises en hiver, la grande distribution répond davantage à la demande qu’aux critères éthiques.

En s’imposant ainsi sur le marché, leur position dominante leur permet de négocier des prix à la baisse. Les producteurs, soumis à cette pression, industrialisent leurs méthodes de production afin d’accroître leurs rendements et ainsi pouvoir espérer faire des économies d’échelle. Cela n’est pas sans conséquences pour l’environnement… De plus, alors que les surfaces agricoles manquent et qu’à peine 7,5% d’entre elles sont consacrées au bio en France, les industriels importent massivement des produits de l’étranger créant ainsi un bio « qui vient d’ailleurs », selon les mots de Mathieu Lancry, directeur de Norabio, une coopérative de 130 agriculteurs bio.

Aussi, comment faire confiance à ces labels aux cahiers des charges multiples et très complexes, qui se révèlent parfois respectés au strict minimum par des producteurs dépendants de leurs distributeurs ?

Afin d’enrayer cette appropriation galopante et la perte en crédibilité qui en découle, l’approvisionnement du consommateur joue un rôle central.


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Consommer intelligemment pour assurer un bio de qualité

agriculture urbaine collecte invendus animatrice en insertion
©Espaces

Il est loin le temps où les consommateurs se contentaient d’être de simples acheteurs. Aujourd’hui, bien au-delà de l’acte d’achat, le consommateur a des attentes tout autant qu’un rôle à jouer. Il entend participer activement à l’élaboration des produits qu’il consomme et du modèle agricole qu’il souhaite encourager. Les consommateurs plébiscitent les produits de qualité, qui leur semblent « bons ». Et aujourd’hui, ce que le consommateur considère comme « bon » va bien au-delà du goût et du prix : rémunération des agriculteurs, impact du produit sur l’environnement, qualité nutritive et sanitaire, provenance, ou encore transparence quant à la composition d’un produit.

Le bio que l’on connait aujourd’hui semble donc être antinomique avec la grande distribution, de par le seul fait qu’il trouve sa pertinence dans la notion de local, de saisonnalité et de savoir-faire paysans.

En France, nous avons la chance de disposer de nombreuses alternatives au bio industriel. Pour éviter la grande distribution et la multiplicité des intermédiaires faisant grimper les prix, les circuits courts, semblent être la voie idéale au maintien des petites et moyennes exploitations en France. AMAP, vente directe sur les marchés ou à la ferme, les groupements de producteurs, les fermes cueillettes, les groupements d’achat de consommateurs…

Autant de solutions qui valorisent les savoir-faire paysans, les rémunèrent plus justement, tout en respectant l’environnement. Sur le plan économique et social, les circuits courts favorisent la vie de quartier et la circulation de l’argent dans la communauté. Ils permettent de recréer un contact entre agriculteurs et habitants des zones urbaines et périurbaines et de soutenir les producteurs locaux. Ils offrent une transparence sur la provenance de la nourriture, les prix et leur mode de production.

Ces modes de production s’apparentent à ce que l’on appelle « l’Agroécologie » : des pratiques agricoles qui visent à promouvoir des systèmes alimentaires viables respectueux des Hommes et de leur environnement.

Aujourd’hui l’agroécologie n’a pas de label. Le terme désigne avant tout une approche agricole, dont les agriculteurs bio sont souvent les meilleurs représentants, leur certification répondant à un cahier des charges bien plus stricte et éthique que tous les labels bio existants. Néanmoins en l’absence d’un label réellement ambitieux et dans l’attente de faire évoluer les exigences du label européen, le label AB reste une garantie de qualité dans nos choix de consommation.

Les consommateurs sont les leviers indispensables, les moteurs pour réussir une transition agroécologique nécessaire. Se libérer du carcan de la petite feuille verte pour revenir à un approvisionnement local, souvent synonyme de saisonnalité et de valeurs paysannes ; ne serait-ce finalement pas la solution face aux casse-têtes des labels bio ?

Pour aller plus loin :