Si les bars et restaurants sont plutôt silencieux ces derniers temps, nous sommes nombreux à avoir envie d’un petit verre, pour fêter la fin de la journée ou se changer les idées. Mais si l’on est de plus en plus attentif à l’empreinte écologique de nos repas, l’est-on autant à l’apéritif ? La Fondation GoodPlanet vous donne quelques éclairages sur l’alcool, pour faire le choix vert !

Vive le naturisme - Biodynamie et vins nature

La viticulture, comme l’agriculture, engendre une importante pollution des eaux et des sols en France. La vigne est une plante très sensible aux maladies, et les viticulteurs ont longtemps traité leurs parcelles de façon préventive, pour éloigner insectes, champignons et autres maladies. Cette surconsommation des pesticides a entraîné une pollution profonde des sols, et la disparition de la biodiversité aux alentours…

Aujourd’hui, de nombreux viticulteurs ont décidé de raisonner différemment, en se tournant vers l’agriculture bio, la biodynamie ou les vins nature. Il est aujourd’hui nécessaire de réfléchir aux impacts environnementaux de la viticulture, surtout lorsque l’on sait, au-delà de la question de la pollution des eaux et des sols, que le réchauffement climatique risque d’impacter fortement les régions viticoles : sensibles aux variations de température, plus de la moitié de ces terres pourraient disparaître dans les années à venir…

Le vin labellisé bio existe seulement depuis 2012, date à partir de laquelle ont été prises en compte la viticulture et la vinification. Le cahier des charges de l’agriculture biologique interdit l’utilisation de pesticides et engrais chimiques de synthèse, et incite à utiliser des engrais naturels et des techniques naturelles pour empêcher l’attaque de prédateurs, la plantation d’herbage pour lutter contre l’érosion des sols, et encourage à réduire les intrants lors de la vinification. Cependant, lors de la confection du vin, le label bio autorise encore des procédés comme l’acidification ou la désacidification, l’ajout de tanins, copeaux de bois, soufre, ou de levures industrielles…

Les vins en biodynamie vont plus loin, et appliquent les principes de l’agriculture biodynamique. Pour être biodynamique, une vigne doit d’abord provenir d’un cépage d’origine biologique. Elle est ensuite cultivée à l’aide de préparations spécifiques, comme des infusions ou des macérations, pour que son sol soit le plus vivant possible et favorise la croissance des grappes. Les différentes étapes de la vinification suivent le calendrier lunaire – qui aurait une possible influence sur la qualité gustative – et autorisent quelques pratiques seulement, comme l’ajout de sucre ou de levures indigènes. Repérez ces vins à l’aide des logos Demeter et Biodyvin, qui sont deux labels français que l’on retrouve sur les étiquettes.

Pour les vins nature, aucun “label” n’est encore disponible. L’Union Européenne n’ayant pas reconnu cette technique de viticulture et vinification, un cahier des charges a été développé par l’Association des Vins Naturels: parmi les exigences, on retrouve des cultures bio, une vendange faite à la main, aucun intrant, et uniquement du soufre comme ingrédient ajouté au jus original. Les vins nature souffrent parfois d’une mauvaise réputation : non fixés par des intrants, cela explique leur jus fragile et leur goût sensible aux variations de température. N’hésitez pas à demander conseil à votre caviste sur la meilleure manière de le conserver, et de le boire.

Pour limiter votre empreinte carbone lorsque vous vous servez un verre de vin, privilégiez également les vins français ! Être chauvin, ça a parfois du bon : un Cabernet Sauvignon du Chili n’aura pas forcément meilleur goût qu’une bouteille vinifiée proche de chez vous ! Et pensez également à son emballage : pourquoi ne pas tester du vin disponible en cubi – les packagings ont été grandement améliorés pour ne pas altérer le goût – ou disponibles en bouteilles consignées. L’entreprise Jean Bouteille en propose dans ses magasins partenaires, tout comme la chaîne de magasins de vrac Day by Day, disséminés sur l’ensemble du territoire.

Une petite mousse ?

Les Français sont les moins grands buveurs de bière d’Europe : on en boit 30 litres par an et par habitant, soit quatre fois moins que les Allemands ! Mais ce n’est pas une raison pour ne pas prêter attention à son impact sur notre planète. 

La culture des céréales utilisées (orge, malt, houblon) pour la bière épuise le sol, et sa production est plutôt gourmande en eau : environ cinq litres sont nécessaires pour obtenir un litre de boisson (contre trois pour le vin). De plus, seulement 1% des bières produites en France est certifié bio : la production de ces céréales n’est pas assez forte pour satisfaire la demande des brasseurs, ce qui fait obstacle à la progression de la bière bio. Certains brasseurs se tournent ainsi vers des houblons venus de Belgique, Autriche, ou même des Etats-Unis… Pas très local ! D’ailleurs, la production du malt de qualité risque elle aussi d’être altérée dans les années à venir, les canicules rendant ses rendements plus aléatoires.  

Si la bière ne nécessite pas de distillation, le processus de brassage (et un peu la fermentation, l’action des levures transformant le sucre en alcool et en CO2) est une grande source d’émissions de gaz à effet de serre : il faut environ deux jours à un arbre pour absorber la quantité de CO2 rejetée par la fermentation nécessaire à la production d’un pack de six bouteilles.  

Pour diminuer son empreinte carbone, tournez-vous vers des bières produites dans votre région, et à la pression : le fût, rechargeable, ne produira aucun déchet, contrairement aux bouteilles de verre et canettes, peu recyclées. 

Et pour être écolo jusqu’à la dernière gorgée de bière, sachez que la bière est un aliment anti-gaspi par excellence : outre les surplus de pain utilisés dans certaines recettes (goûtez les bières Pain de Minuit, Cocomiettes, BrotBier,…)la drèche, le résidu de la fermentation, peut être réutilisée de plein de manières différentes : crackers, ramen, vaisselle comestible, ou même à la place des tourteaux de soja comme alimentation pour le bétail ! 

Si l’alcool fort n’est pas votre tasse de thé, pourquoi ne pas vous servir une bolée ? Le cidre ne nécessite pas de distillation, et sa fabrication ne mobilise pas de céréales, uniquement la fermentation naturelle des pommes : c’est moins d’énergie utilisée pour sa production ! Les pommes sont également un fruit que l’on trouve toute l’année en abondance partout sur notre territoire, et pépin dans le trognon, les vergers sont le terrain de jeu préféré de toute la biodiversité : abeilles, insectes, oiseaux… !  

Prost ! Les alcools forts

Votre cocktail préféré, vous vous êtes déjà penchés sur son étiquette ? Plutôt exigeants avec nos assiettes, on est souvent moins regardant sur la qualité, la provenance ou les ingrédients de l’alcool que l’on se sert… Pourtant, tous ne se valent pas, et leur fabrication engendre de nombreuses questions.

Si vous pensez ti-punch, rappelez-vous que la culture de la canne à sucre n’est pas aussi transparente que son cocktail phare. La culture de la canne est très fragile, car elle se développe dans des écosystèmes insulaires uniques (Martinique, Guadeloupe…), et est très sensible aux insectes comme aux intempéries. Gourmande en eau, la culture de la canne est marquée par l’emploi massif de pesticides, qui ont contribué à polluer les nappes phréatiques et à appauvrir les sols. La coupe se fait majoritairement par des procédés mécaniques polluants. Le processus de distillation du sucre en alcool est, lui aussi, extrêmement énergivore: plusieurs étapes de chauffage successives sont nécessaires pour obtenir le précieux liquide, mobilisant des ressources incroyables de combustible et d’énergie, sans parler des particules rejetées dans l’air lors de la combustion des cannes, et des déchets, comme la vinasse, un résidu de la distillation rempli de résidus liquides, d’azote et de chlore, souvent rejeté dans la nature, en forêt ou dans la mer toute proche…

Certaines distilleries repensent leurs organisation et infrastructures, et commencent à s’attaquer aux problèmes, par exemple en réutilisant les déchets de la production, comme la bagasse, en matériaux combustibles alimentant les chaudières.

Toutes ces nouvelles vous ont donné envie d’avaler un shot ? Passez votre tour, car vodka et gin sont considérés comme les alcools les plus polluants ! Comme le rhum, la culture des céréales nécessaires à leur fabrication épuise les sols, et nécessite énormément d’eau. Leur distillation nécessite également encore plus d’énergie que pour confectionner les autres alcools… D’autant que contenu et contenant vont de pair : plus une boisson est alcoolisée, plus son impact sur l’environnement est élevé, et plus son emballage est lourd, plus il mettra du temps à disparaître : environ 4 000 ans pour une bouteille en verre …

Sans alcool la fête est plus folle

Depuis l’émergence du Dry January, ce mouvement venu d’Angleterre qui prône de passer chaque mois de janvier sans alcool, de nombreuses marques se sont lancées sur le créneau des mocktails. Les mocktails, ce sont des apéritifs sans alcool: les solutions sont désormais nombreuses à l’heure de l’happy hour ! L’essor des aliments fermentés a également démocratisé l’accès au kombucha, au kéfir ou à la ginger beer : n’hésitez pas à aller fureter les rayons de vos magasins ou épiceries de producteurs !

Pour aller plus loin

Si le sujet vous intéresse, écoutez l’épisode n°28 du podcast “Sur le Grill” du mouvement écotable, qui décrypte le sujet de la bière artisanale avec Edward Jalat-Dehen, brasseur à la Brasserie de l’Être.

Pour limiter votre empreinte carbone, privilégiez des alcools français labellisés bio, cultivés et assemblés en France, comme le whisky Evadés, le gin Lachanenche, ou le surprenant pastis Maison Hamelle fabriqué en plein Paris !

Soyez curieux, en prêtant davantage attention aux saveurs qu’aux degrés, en goûtant aux apéritifs et jus à base de plantes et fruits locaux : vous découvrirez peut-être votre nouveau cocktail favori ! Un premier pas vers des alcools plus doux, pour nous comme pour l’environnement !

Retrouvez également cet article dans le magazine Marmiton n°58 Mars-Avril 2021

L’abus d’alcool est dangereux, à consommer avec modération.