Un photographe qui aimait les photographes

Yann Arthus-Bertrand : « Comme tout le monde, j’ai été très attristé par la disparition de Bruno. Nous nous connaissions depuis longtemps mais ne sommes devenus proches que lorsque l’Académie des beaux-arts nous a réunis.
Bruno c’était un photographe qui aimait sincèrement les autres photographes. Il se passionnait vraiment pour leur travail. Je me rappelle l’année dernière (NDLR: en 2019) quand la première édition du prix de photographie de l’Académie a récompensé le photographe et photo journaliste Raghu Rai, Bruno connaissait son travail sur le bout des doigts. Il s’y était longuement intéressé. Comme il s’intéressait à la photo de beaucoup d’entre nous, avec une vraie admiration qui n’est pas si courante.
L’Académie m’aura donné l’occasion de découvrir cette qualité chez lui, j’étais vraiment heureux de travailler avec Bruno. »

« C’est grâce à Bruno Barbey que j’ai vendu mon premier sujet »

Yann Arthus-Bertrand : « Quand je débutais la photo au Kenya, dans les années 70, je rêvais de vendre mes photos. A l’époque, on pouvait prendre sa valise, emmener nos diapositives à la porte des grands magazines.
On arrivait, on sonnait, on disait « Bonjour, je suis photographe » et on nous recevait. Les gens prenaient le temps de regarder nos photos, de discuter. Et des fois ça se terminait par un « oui, pourquoi pas ». A l’époque nous étions moins de photographes, c’était normal. Aujourd’hui ça serait impossible !
De mon côté j’essayais désespérément de vendre mes images à GEO. Et un jour on m’apprend que le Directeur artistique de GEO est à Paris, chez l’agence Magnum. Et que c’est LA personne à qui montrer mes photos pour espérer être retenu. En ce temps-là je connaissais bien sûr les grands photographes animaliers, mais très peu le reste, encore moins les agences comme Magnum que je ne connaissais que de nom.

Insouciant et convaincu, je vais donc chez Magnum, rue Christine, et je demande à parler au Directeur artistique pour lui montrer mes images du Kenya. On m’annonce qu’il est en rendez-vous avec Bruno Barbey, en train de regarder des photos. On me fait attendre et puis on m’emmène dans son bureau.
Je rencontre alors Bruno pour la première fois. J’avais 30 ans, lui quelques années de plus seulement. Et c’est Bruno qui me dit « Bon, vas-y montre ta photo ». Je lui montre mes diapositives et Bruno me lance « Mec, c’est génial ce que tu fais ! » avant de s’adresser au Directeur artistique de GEO : « Les histoires de ce type-là, avec ses lions, sont extraordinaires ! Tu devrais prendre le sujet et aussi suivre son travail à venir ».
Et c’est comme ça que j’ai publié mon premier sujet. Aussi simplement que ça, grâce à Bruno Barbey. Un photographe déjà confirmé qui a pris le temps de s’attarder sur le travail d’un autre photographe qui revenait simplement du Kenya.
Merci Bruno… »

Bruno Barbey et la Garde Républicaine

Crédit photo : Yann Arthus-Bertrand