Quel est le point commun entre l’apparition d’un virus vieux de plus de 30 000 ans, la hausse de la température et la destruction d’un village en Alaska ? À priori pas grand-chose et pourtant les origines sont communes : ils ont tous été causé par la disparition progressive du permafrost. Ce phénomène n’est rien d’autre qu’une des conséquences du réchauffement climatique.

En fondant, les couches de glace présentes dans le pôle Nord libèrent gaz à effet de serre et virus emprisonnés depuis parfois des centaines de milliers d’années. Les conséquences ? Elles sont multiples et menacent grandement la survie de l’Homme sur notre planète.
Aujourd’hui, la crise sanitaire nous touche de plein fouet et nous rappelle à quel point la santé humaine est intrinsèquement liée à la protection de notre planète. La « boucle rétroactive », comme certains scientifiques appellent ces cercles vicieux climatiques, serait-elle le reflet d’une situation qui atteint son point de non-retour ? Comment pouvons-nous raisonnablement inverser la tendance ?
Pour comprendre les liens de causes à effets et savoir comment agir à son échelle, voici quelques éléments de compréhension.

Le permafrost, la boîte noire de tous les dangers ?

Ce n’est un secret pour personne aujourd’hui : les activités humaines sont responsables du réchauffement climatique et les conséquences ne se comptent malheureusement plus sur les doigts d’une main. Entre autres manifestations : hausses des températures, fontes des glaciers, hausses du niveau des mers, perturbations des écosystèmes marins et terrestres, sécheresses, migrations humaines etc. Parmi ces conséquences en cascade, l’une est longue, silencieuse et invisible pour la plupart d’entre nous mais pourrait s’avérer dramatique pour l’humanité entière : la fonte du permafrost.

Le permafrost, pergélisol en français, est un phénomène géologique naturel désignant les sols dont la température reste sous le seuil de 0°C pendant au moins deux années consécutives. Aujourd’hui, ces couches de glace recouvrent 25% de la surface terrestre, notamment en Russie, Canada et Alaska. En temps normal, seule la couche de terre supérieure dégèle en été et permet le développement de la végétation. Or, sous l’effet du réchauffement climatique et avec des températures moyennes supérieures à 1°C par rapport à l’ère préindustrielle, un dégel des couches profondes est en cours. Une zone plus étendue que la France et l’Allemagne est en train de fondre pour la première fois depuis 11 000 ans ! Selon les scénarios les plus optimistes, d’ici 2100, 30% du pergélisol serait amené à disparaître.

Le problème est que le permafrost stocke deux fois plus de méthane CH4 et de dioxyde de carbone Co2 que l’atmosphère terrestre. Ces quantités de gaz à effet de serre correspondent à environ 15 années d’émissions humaines. Libérés, ces gaz entraineraient un réchauffement climatique encore plus puissant et rapide que prévu, cette fameuse « boucle rétroactive », symptomatique des phénomènes climatiques.

Comprendre le permafroste en quelques chiffres - infrographie carre

Outre ses effets climatiques, la fonte du permafrost, qui abrite des bactéries et virus parfois oubliés, représente une menace sanitaire sans précédent. À en croire le biologiste Jean-Michel Clavier, le permafrost est une « bombe à retardement virale et bactérienne » qui agirait comme un « réfrigérateur puissant pour la vie microbienne ».
L’impact du dégel du permafrost se mesure aussi localement. Quand le pergélisol fond, les couches de glace s’amenuisent ce qui affaiblit, voire détruit, les infrastructures présentes. C’est le cas du village alaskien Newtok qui a dû voir ses 380 habitants quitter leur terre. Le dégel du permafrost et l’érosion du sol ont augmenté les risques d’inondation et provoqué l’affaiblissement des terres qui soutiennent les habitations.

Le permafrost, l’affaire de tous

Loin des températures glaciaires, la fonte du permafrost concerne néanmoins tout le monde
Loin des températures glaciaires, la fonte du permafrost concerne néanmoins tout le monde

Comment expliquer que la fonte des sols glacés à plusieurs dizaines de milliers de kilomètres de chez moi puisse avoir un impact direct sur ma vie ? Trois raisons majeures émergent.
Comme évoqué précédemment, la fonte du permafrost produit plusieurs gaz à effet de serre. Analogiquement, ces couches de glaces pourraient s’apparenter à un grand congélateur où sont gelés fruits, légumes et autres produits périssables. Si ce dernier tombe en panne, la glace fond, les aliments à l’intérieur dégèlent et deviennent la proie de tout un tas de microbes qui vont alors les transformer. Or lorsque ces microbes mangent, ils libèrent des gaz à effet de serre. Pour le permafrost, c’est pareil. Lorsque les couches de glaces fondent, les déchets organiques deviennent accessibles aux microbes qui produisent du Co2 et CH4. Selon les estimations, le permafrost pourrait ainsi émettre en moyenne 1,5 milliard de tonnes de gaz à effet de serre chaque année pendant les 100 prochaines années. C’est 3 fois plus que ce qu’émet la France tous les ans.

Le cycle du carbone - comprendre le permafroste

Le mercure est aussi une donnée importante à prendre en compte. Le permafrost émettrait 1,5 million de tonnes de mercure, soit 2/3 de la totalité présente sur terre. Ce chiffre est inquiétant dans la mesure où le mercure est une substance très toxique. Par exemple, dans les années 1950 au Japon, une usine a rejeté de grandes quantités de mercure dans la mer intoxiquant des milliers de personnes et provoquant ainsi de lourdes pathologies chez les malades et plusieurs centaines de décès.

Enfin la dernière raison, et peut-être la plus révélatrice en ces temps : les virus. L’été 2016 en Sibérie a été marqué par la mort subite d’une centaine de rennes, une vingtaine de personnes sont tombées malades et un jeune garçon est décédé. Tous ont été victime de l’Anthrax, maladie issue d’une bactérie dangereuse, la Bacille du charbon, pourtant disparue depuis les années 1940. Rapidement les scientifiques ont pu expliquer cette contamination : en fondant, le permafrost a libéré de vieilles carcasses de rennes morts, encore porteuses de la bactérie. Les microbes qui ont survécu au gel, ont alors contaminés animaux et humains.
En parallèle, de nombreuses études réalisées sur des échantillons de permafrost ont permis de faire ressurgir des virus tel que le Mollivirus, vieux de plus de 30 000 ans mais inoffensif pour l’Homme. Néanmoins rien interdit qu’un jour des virus ou bactéries potentiellement mortels émergent à cause de la fonte du permafrost, laissant impuissants chercheurs et scientifiques. Tiens, cela nous évoque quelque chose…

La logique voudrait qu’il faille se tenir loin du permafrost pour éviter ces désagréments et ainsi être en sécurité. Néanmoins il se peut, au contraire, que ces zones de fontes soient de plus en plus peuplées les années à venir. D’abord parce qu’il y fera moins froid qu’auparavant mais surtout parce que certaines zones regorgent de gaz, de pétrole et de minerais. La fonte devrait faciliter l’accès au secteur et pousser les entreprises à s’y installer pour les exploiter.

Réduire et compenser ses émissions pour soulager notre climat

COEUR-DE-VOH -Cœur de Voh en 1990, Nouvelle-Calédonie, France© Yann Arthus-Bertrand
COEUR-DE-VOH -Cœur de Voh en 1990, Nouvelle-Calédonie, France© Yann Arthus-Bertrand

Alors que la fonte du permafrost est identifiée comme l’une des conséquences les plus dramatiques selon le GIEC, nous avons tous un rôle à jouer pour notre climat. Particuliers ou entreprises, agir efficacement pour le climat en limitant ses émissions de gaz à effet de serre est primordial.
Comment s’y prendre ? Soulager le climat, c’est d’abord identifier puis réduire les gaz à effet de serre que nous émettons au quotidien et sur lesquels nous pouvons agir à la source.
En parallèle, la compensation carbone permet d’agir pour la part d’émissions de gaz à effet de serre incompressibles que nous ne pouvons ou ne savons pas encore réduire de manière satisfaisante, en soutenant des projets de terrain environnementaux et sociaux.

Concrètement, voici les différentes étapes :

 

  1. Je calcule mon empreinte carbone : Pour réduire efficacement votre empreinte carbone, faîtes un bilan annuel ou ponctuel de vos émissions.
  2. Je réduis mes émissions carbone : De nombreuses actions vous permettent d’améliorer votre bilan carbone.
  3. Je compense et aide les familles vulnérables : Vous pouvez compenser la part résiduelle tout en aidant, par exemple, les familles vulnérables à accéder à une énergie renouvelable et gratuite qui améliore leurs conditions de vie ou en participant à l’amélioration de la gestion des déchets dans les grandes villes africaines.

 

Pour calculer votre empreinte carbone, le pôle Action Carbone Solidaire de la Fondation GoodPlanet vous accompagne dans votre démarche en mettant à disposition gratuitement la méthodologie du calculateur carbone pour les particuliers. Cette dernière vous permet, en peu de temps, d’estimer l’impact de votre activité sur le climat et vous propose des pistes d’actions concrètes. Voici quelques idées d’actions à mettre en place :

  1. Prendre des vacances à faible impact carbone : Un seul aller-retour Paris-New York (12 000 km) correspond à sa consommation en chauffage pendant un an.
  2. Décarboner son alimentation : Sans le savoir, nos assiettes cachent des quantités astronomiques de Co2. Pour tout savoir sur la face cachée de notre alimentation, consultez l’article 3 minutes pour comprendre l’empreinte carbone de nos assiettes.
  3. Allonger la durée de vie de nos produits et éviter ceux à usage unique : Le secteur du textile par exemple émet plus que les vols internationaux et le trafic maritime réunis. Du champ à la boutique, un jean peut parcourir 1,5 fois le tour de la Terre, soit 65 000km.
  4. Abandonner la voiture à essence : Parfois pour se rendre loin ou à des endroits mal desservis, on est obligé de prendre la voiture mais là encore des alternatives existent : covoiturage, auto-partage etc.
  5. Se fournir en énergie verte : Préférez un fournisseur qui s’approvisionne localement en énergie verte comme par exemple Enercoop.

Si vous souhaitez en savoir plus sur la réduction et le compensation carbone, consultez le site de la Fondation GoodPlanet et n’hésitez pas à solliciter nos experts pour vous accompagner.

« Nous avons tous notre rôle à jouer. C’est par l’accumulation d’actes modestes réalisés à notre échelle et reproduits çà et là que nous parviendrons à changer les choses en profondeur » Yann Arthus-Bertrand